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Les yeux dans les yeux. Téléphone ou face-à-face : quel impact sur les réponses ?

L’expérience de l’enquête Changement Organisationnel et Informatisation 2006

Interrogées au téléphone, les personnes donnent-elles les mêmes réponses que quand elles sont interrogées en face-à-face ?

L’enquête Changement organisationnel et informatisation de 2006 (COI 2006) constitue un laboratoire intéressant pour étudier cette question, puisque 14 % des 14 000 répondants à cette enquête ont été interrogés en face-à-face faute d’avoir pu être contactés par téléphone. Même si les modes de collecte se sont diversifiés depuis 2006 (avec la généralisation de l’accès à internet et les progrès des annuaires de téléphonie mobile), les résultats enregistrés dans l’enquête COI 2006 demeurent une source de réflexions pertinentes.

L’analyse statistique livre en effet plusieurs enseignements intéressants :

  • les répondants en face-à-face sont plus souvent des femmes, des ouvriers, des personnes en mauvaise santé et peu diplômées, et ont plus souvent des parents nés à l’étranger ;
  • les enquêteurs ont plus souvent été amenés à conduire l’enquête en face-à-face que les enquêtrices ;
  • à caractéristiques observables identiques des enquêtés et des enquêteurs, les entretiens en face-à-face aboutissent à une description plus critique de leurs conditions de travail ;
  • cet écart entre les réponses au téléphone et celles en face-à-face s’élargit à mesure qu’on approche de la fin du questionnaire, comme si la confiance qui s’établit entre l’enquêté et l’enquêteur amenait à une plus grande sincérité du premier au fil de l’entretien ;
  • cet écart entre téléphone et face-à-face concerne essentiellement les hommes, qui par exemple hésitent moins à se plaindre d’être mal payés ou mal reconnus dans leur travail en face-à-face ; les femmes, elles, semblent livrer leur point de vue aussi spontanément au téléphone qu’en présence d’un enquêteur.

Ces constats doivent être nuancés car des différences non observées peuvent exister entre les personnes interrogées par téléphone ou en face-à-face, qui contribueraient à expliquer les écarts ici constatés. Il semble néanmoins que la comparabilité des résultats d’une enquête à l’autre nécessite une certaine continuité des modes de collecte.