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L'ajustement des entreprises pendant la crise de 2008

Recours aux heures supplémentaires et à l’activité partielle

Les entreprises utilisatrices d’activité partielle connaissent davantage une baisse de leurs effectifs et, ce, en dépit de l’utilisation de la mesure.

L’économie mondiale a subi en 2008/2009 la récession la plus sévère depuis l’après-guerre. La crise a d’abord été financière, avec l’effondrement du marché des crédits subprime aux États-Unis en 2006/2007, puis s’est propagée à l’économie réelle au cours de l’année 2008, entraînant un recul sans précédent de l’activité. Dans ce contexte, les entreprises se sont ajustées de manière différente selon les pays. Parmi les facteurs qui expliquent les effets différenciés de la crise sur les marchés du travail, l’ajustement via les dispositifs de flexibilité interne tels que l’activité partielle, les heures supplémentaires, les comptes épargne-temps, l’annualisation ou la modulation du temps de travail a semblé jouer un rôle important pour atténuer les effets de la baisse de la demande.

Notre analyse, centrée sur les entreprises de 10 salariés ou plus des secteurs concurrentiels non agricoles dont la durée hebdomadaire collective de travail est égale à 35 heures (i.e. entreprises qui déclarent une durée collective hebdomadaire moyenne habituelle strictement inférieure à 36 heures), s’intéresse à leurs ajustements à travers l’utilisation de deux instruments de flexibilité interne, les heures supplémentaires et l’activité partielle, entre 2007 et 2010 au niveau macroéconomique et au niveau microéconomique en France. Elle s’appuie sur des données détaillées d’entreprises issues à la fois de sources administratives et d’enquêtes. Nous utilisons principalement les enquêtes trimestrielles Acemo qui donnent des informations sur les heures supplémentaires et les données administratives exhaustives Sinapse sur l’activité partielle. Dans la partie microéconomique, ces données sont appariées avec des données administratives d’établissement (Déclarations annuelles de données sociales – DADS) et d’entreprise (Bénéfices réels normaux – BRN et Fichier approché des résultats ESANE – FARE).

Au niveau macroéconomique, il apparaît que sur la période la plus forte de la crise, l’utilisation par les entreprises à 35 heures des heures supplémentaires, dispositif pro-cyclique, et des heures d’activité partielle, dispositif contra-cyclique, a été assez faible, compte tenu de la conjoncture, traduisant un ajustement à la marge de ces entreprises à travers ces deux dispositifs (ou en complément d’autres outils).

Une typologie a ensuite permis d’identifier, au niveau microéconomique, sept profils d’entreprises à 35 heures selon leur utilisation des deux instruments. Les types d’ajustements à travers les heures supplémentaires et l’activité partielle s’avèrent largement corrélés aux caractéristiques de l’entreprise, en particulier à sa taille et son secteur d’activité, à sa situation économique mais aussi aux caractéristiques de sa main-d’œuvre. Les traits les plus saillants s’observent pour les entreprises qui ont utilisé l’activité partielle.

Par ailleurs, toujours au niveau microéconomique, à partir d’une équation d’emploi, ont été analysées les corrélations entre les ajustements possibles par les heures supplémentaires et les heures d’activité partielle identifiés à l’aide de la typologie d’entreprises et de la variation des effectifs. Il en résulte que les entreprises qui ont utilisé l’activité partielle ont plus souvent connu une baisse de leurs effectifs sur la période et, ce, en dépit de l’utilisation de la mesure. En revanche, les ajustements uniquement via les heures supplémentaires sont moins corrélés à l’évolution de l’emploi.