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Rénovation énergétique des bâtiments : quels besoins de main-d'œuvre en 2030 ?

Ouvriers du bâtiment, chefs de chantier, architectes : on estime qu’il faudra créer 170 000 à 250 000 emplois supplémentaires d’ici 2030 dans la rénovation énergétique des bâtiments.

Isoler le bâti existant et adopter des modes de chauffage moins carbonés sont les voies d’une modération nécessaire de nos émissions de gaz à effet de serre. Pour y parvenir, il faudra mobiliser 20 à 30 milliards d’euros d’investissement annuel supplémentaire dans la rénovation d’ici la fin de la décennie. Un effort financier qui ne saurait à lui seul suffire. Y aura-t-il assez de bras dans le secteur de la construction déjà en pénurie de main-d'œuvre ? Car les estimations estiment qu’il faudra créer 170 à 250 000 emplois supplémentaires d’ici 2030 dans la rénovation énergétique des bâtiments.

Cette note d’analyse fait suite à la deuxième Conférence annuelle des métiers et s’inscrit dans le prolongement de l’exercice de prospective Les Métiers en 2030, publié par la Dares et France Stratégie en 2022, qui dressait un panorama des dynamiques et des difficultés probables de recrutement dans la décennie à venir.

Des créations d’emploi liées à une dynamique de rénovation plus forte dans le quart nord-est

Dans le scénario bas carbone, l’emploi dans les métiers du bâtiment susceptibles de réaliser les rénovations énergétiques s’accroîtrait de 188 000 postes entre 2019 et 2030 en France métropolitaine.

Ces créations d’emploi devraient être particulièrement marquées dans les régions les plus densément peuplées, l’Île-de-France et l’Auvergne-Rhône-Alpes, qui cumulent dynamisme économique et forts besoins en rénovation du bâti. Le territoire francilien compte pour 20 % des besoins en rénovation de la France métropolitaine et concentre également l’emploi des métiers de cadres du bâtiment (architectes, ingénieurs, chefs de chantier) dont l’essor, déjà marqué par le passé, est stimulé par la transition écologique (23 000 postes créés entre 2019 et 2030).

L’Auvergne-Rhône-Alpes contribue également fortement aux besoins de rénovation (13 %), ce qui, combiné à son dynamisme économique et démographique, devrait conduire à la création de 34 000 emplois dans le bâtiment entre 2019 et 2030.

Les régions du quart nord-est, quant à elles, se situent en retrait de la dynamique nationale d’emploi à l’horizon 2030 dans le scénario de référence. La transition bas carbone et les besoins de rénovation devraient conduire à une inversion de cette tendance dans les métiers du bâtiment, dont l’emploi progresserait de près de 9 % dans les Hauts-de-France et le Grand Est, en particulier parmi les ouvriers qualifiés (gros œuvre et second œuvre) et les cadres. Dans ces territoires où les températures hivernales sont les plus froides, la consommation énergétique y est plus élevée qu’ailleurs et les modes de chauffage encore très carbonés (gaz), ce qui impose des travaux conséquents d’isolation et de changement de chaudières.

Dans les régions du Sud-Ouest, les plus créatrices d’emploi dans le scénario de référence, la transition bas carbone conduirait à une accélération moindre qu’ailleurs de la dynamique des métiers du bâtiment (9 % de croissance de l’emploi), désormais inférieure à la moyenne métropolitaine (11 %). Ces régions sont très attractives pour les retraités et les actifs en emploi venus d’autres régions, mais la douceur du climat nécessite moins d’efforts de décarbonation du bâti, à l’horizon 2030 tout au moins.

Création nette (2019-2030) d'emplois dans les métiers du bâtiment par région dans le scénario de référence et le scénario bas carbone

Des difficultés de recrutement 

La rénovation énergétique des bâtiments devrait accroître les difficultés à recruter les professionnels qui réalisent ces travaux, en particulier les ouvriers qualifiés du second œuvre et du gros œuvre. Pour éviter que les pénuries de main-d’œuvre ne freinent le rythme de la transition énergétique, il est nécessaire de s’atteler aux causes structurelles qui affectent l’attractivité de ces métiers en améliorant leurs conditions de travail, leur rémunération ou leur mixité.
Favoriser la réallocation de la main-d’œuvre du neuf vers la rénovation nécessite aussi de renforcer dès à présent les compétences de ces professionnels, tandis que les exigences de performance énergétique des réalisations imposent de développer une culture de la qualité et du résultat. C’est l’objet de la note d’analyse « Rénovations performantes des bâtiments : comment répondre aux besoins en emplois-formation ? », paru conjointement à la présente note, qui établit une cartographie des formations disponibles dans les différents territoires.