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Des demandeurs d’emploi qui travaillent ?

Les 7 visages de l’activité réduite

Ce document d’études propose dans un premier temps un état des lieux du recours à l’activité réduite, en exploitant des données issues du système d’information de Pôle emploi. Il présente ensuite un panorama des trajectoires des demandeurs d’emploi en activité réduite.

Fin 2015, un peu moins d’un demandeur d’emploi indemnisable sur deux1  avait exercé une activité rémunérée au cours du mois (communément appelée « activité réduite »). Leur part au sein de l’ensemble des demandeurs d’emploi indemnisables tend à croître depuis 2009.

Le dispositif d’activité réduite a pour objectif initial de favoriser le retour à l’emploi : le demandeur d’emploi exerce une activité rémunérée, parallèlement à sa recherche d’emploi, ce qui lui permet de conserver un lien avec le marché du travail et a vocation à favoriser une sortie vers l’emploi durable. Il apparaît cependant qu’un certain nombre de demandeurs d’emploi s’inscrivent durablement dans le dispositif, pour pallier la faiblesse de leur allocation chômage ou lisser leur revenu, dans le cas d’une trajectoire professionnelle heurtée.

Ce document d’études vise à éclairer la diversité des rôles que remplit de facto ce dispositif phare de l’assurance chômage, situé à la frontière entre assurance et solidarité. Il propose dans un premier temps un état des lieux du recours à l’activité réduite, en exploitant des données issues du système d’information de Pôle emploi. Il présente ensuite un panorama des trajectoires des demandeurs d’emploi en activité réduite. Une typologie est établie au moyen d’une classification par analyse séquentielle (optimal matching). Il en ressort sept groupes de trajectoires, associés à des profils sociodémographiques et des situations hétérogènes au regard de d’indemnisation.

L’interaction entre l’activité réduite et les dispositifs de solidarité (RSA, prime d’activité, allocations logement) est analysée à l’aide d’une maquette de cas-types, pour deux trajectoires d’individus qui exercent très régulièrement une activité réduite (en moyenne 19 mois sur les 24 mois d’observation), le plus souvent en cumulant partiellement salaire d’activité et allocation chômage. Cette simulation tient compte des salaires issus de l’activité réduite, de l’allocation chômage le cas échéant, mais aussi des prélèvements fiscalo-sociaux et des principales prestations sociales théoriquement perçues.

Pour les deux cas étudiés, le cumul entre allocation chômage et revenu d’activité permet d’améliorer nettement le revenu global des individus par rapport à une situation où le cumul serait impossible. Il induit un lissage du revenu, qui se traduit par de plus faibles incitations financières à l’activité mais garantit néanmoins que la reprise d’activité n’entraîne pas de diminution du revenu global. La substitution entre dépenses d’assurance chômage et dépenses de solidarité est réelle : le surcroît de dépenses d’assurance chômage lié à l’activité réduite est contrebalancé à 60 % par une diminution des prestations de solidarité pour le cas étudié.

Enfin, cette étude apporte quelques éléments empiriques pour examiner l’hypothèse d’un recours « stratégique » à l’activité réduite par certaines entreprises. Ce dispositif pourrait jouer le rôle d’une subvention implicite à la récurrence de contrats de très courte durée, entrecoupés de jours indemnisés, dans le cadre d’une relation suivie entre un individu et un employeur. Si certaines trajectoires en activité réduite observées dans les données pourraient effectivement correspondre à une succession de contrats très courts, reflétant la mise en oeuvre d’une éventuelle stratégie, ces trajectoires restent quantitativement marginales puisqu’elles ne concernent, tout au plus, que 6 % des individus de l’échantillon (94 000 personnes environ), réalisant 15 % de l’ensemble des mois d’activité réduite observés.

  • 1Il s’agit de la part de demandeurs d’emploi indemnisables par l’assurance chômage inscrits en catégorie B ou C, c’est-à-dire qui ont exercé une activité rémunérée dans le mois, parmi l’ensemble des demandeurs d’emploi indemnisables tenus de rechercher un emploi, c’est-à-dire inscrits en catégorie A, B ou C.