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Salaire minimum interprofessionnel de croissance - rapport 2009 (juin)

Conformément à la loi du 3 décembre 2008, le nouveau groupe d’experts indépendants nommé en mai 2013 livre ici son analyse du salaire minimum interprofessionnel de croissance (SMIC) et son avis sur son évolution.

Le SMIC occupe en France une place tout à fait importante, presque singulière, au regard de la situation prévalant dans la plupart des autres pays développés. Les conséquences induites vont souvent en sens inverse des effets recherchés. 

Les hausses du SMIC ont été particulièrement soutenues depuis une quinzaine d’années. Coups de pouce du gouvernement, impact de la réduction du temps de travail et convergence des minima salariaux en ont été les principaux moteurs. Le pouvoir d’achat du SMIC horaire a progressé de 30 % depuis 1994, soit une progression de 1,9 % par an en moyenne deux fois plus rapide que le pouvoir d’achat du salarie mensuel de base (+0,8 % par an en moyenne). Il a atteint un niveau, relativement au salaire médian,  historiquement élevé. C’est même l’un des plus élevé au sein des pays de l’OCDE qui ont un salaire minimum légal. 

Cette dynamique du SMIC a provoqué un tassement de la distribution des salaires en bas de l’échelle. La diffusion partielle des hausses de SMIC fait qu’au total, environ 40 % des salariés sont, directement ou indirectement, concernés par les relèvements du  salaire minimum. La proportion de salariés rémunérés sur la base du SMIC, c'est-à-dire directement concernés par sa revalorisation au 1er juillet, a considérablement augmenté depuis 1994. Elle demeurait en 2008 au-dessus de 14 % et ce, malgré l’absence de coup pouce au cours des deux dernières années et l’encouragement des pouvoirs publics à la négociation collective de branche.

Les conséquences sur l’emploi, notamment des personnes peu qualifiées, de l’augmentation rapide du SMIC sont incontestablement défavorables. Le coût du travail au niveau du SMIC est aujourd’hui l’un des plus élevés des pays de l’OCDE. Et les allégements de charges mis en place à partir du début des années 1990 n’ont pu qu’atténuer cette hausse du coût du travail peu qualifié. La logique à l’origine « offensive » des baisses de charges, visant à réduire le coût du travail peu qualifié, a rapidement cédé la place à une logique « défensive » visant à compenser les hausses de SMIC. Environ 800 000 emplois en dépendraient aujourd’hui. De solides constations empiriques convergent pour affirmer qu’un coût du SMIC élevé évince du marché du travail les travailleurs les plus fragiles. Les premiers concernés sont les jeunes, très exposés au risque de chômage, et les catégories de travailleurs
peu ou pas diplômés. 

 La politique du SMIC ne peut constituer un moyen de lutte efficace contre la pauvreté. Il apparait que les inégalités d’accès à l’emploi engendrent dans notre pays une part prépondérante de la pauvreté. Les effets positifs des revalorisations du SMIC sur les revenus des personnes en place sont rapidement contrebalancés par l’impact négatif sur l’emploi, notamment des personnes peu qualifiées. Les politiques de soutien au revenu du travail à travers la Prime pour l’emploi ou le Revenu de solidarité active qui est  entré en vigueur au 1er juin, apparaissent plus appropriées pour réduire les inégalités des revenus du travail en découplant revenu et coût du travail peu qualifié. A la lumière du constat qui vient d’être établi, notamment au regard des évolutions passées du SMIC et de leur impact sur le marché du travail, le Groupe a estimé devoir, dans l’élaboration de ses préconisations, privilégier à la fois la protection du pouvoir d’achat des Les dernières études de l’OCDE démontrent que les prestations liées au travail sont nettement plus efficaces que le salaire minimum pour lutter contre la pauvreté au travail, car mieux ciblées sur les ménages pauvres. 

La Dares est rapporteur du groupe de travail des experts SMIC.

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